Symphytum
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De la validité des sacrements.

Je reviens ici avec cet article, dont j'avais promis la rédaction, en réparation de l'erreur que j'avais commise sur la validité des ordres reçus, ou donnés par certains ennemis déclarés de l'Eglise. Après confrontation de mon (ancien) point de vue, et étude approfondie, je ne pouvais plus soutenir cette opinion.

Mon erreur était sur la qualité de l'intention ministérielle pour la validité d'un sacrement, je n’admettais pas que quelqu'un qui avait là volonté ouverte de détruire l'Eglise pouvait avoir l'intention de faire "ce que fait l'Eglise". Cette m'erreur m'a été inculquée par un certain groupe, dont je ne fais plus partie aujourd'hui, qui en fin de compte rejetait comme douteux ou invalide tous les sacrements qui n'ont pas été donné de leur main. Dieu merci qu'il ne m'ait pas abandonné aux ténèbres de mon esprit !

Voici donc, en esprit de réparation, le résultat de ma recherche sur la validité d'un Sacrement. En première partie j'exposerai de façon générale les conditions d'une administration valide, puis je continuerai en développant sur l'intention ministérielle.

1) Conditions pour une administration valide.

Les conditions pour l'administration valide d'un Sacrement dépendent partiellement de la qualification d'un ministre, et d'autre part de sa disposition intérieure. Un ministre n'a pas besoin d'avoir la foi ou d'être en état de grâce, mais il doit avoir la bonne intention.

* Le ministre: Il doit être justement qualifié, ainsi il est impossible à un laïc d'administrer la confirmation, de consacrer un prêtre, ou d'absoudre des péchés, mais si un prêtre peut consacrer l'eucharistie ou autre, il ne peut consacrer d'évêque ou de prêtres, bien qu'il puisse donner de façon extra-ordinaire les ordres mineurs et la confirmation.

* La matière et la forme: Les théologiens scolastiques ont introduit la coutume, adoptée par l'Église enseignante, de distinguer dans le rite essentiel de chaque Sacrement une partie plus indéterminée ou matière, une autre que l'on considère comme déterminante, ou forme. L'emploi d'une matière qui, humainement parlant, n'est pas substantiellement la matière prévue par celui qui a autorité pour déterminer le rite essentiel du Sacrement, le rend évidemment invalide. Mais nous devrons constater, bien souvent du moins, que seul l'enseignement de l'Église nous permet de déterminer dans le concret ce qui doit être considéré comme changement substantiel, et ce qui doit être considéré comme changement accidentel, apporté à la matière d'un Sacrement. De même, tout changement apporté à la forme d'un Sacrement qui aurait pour effet de la rendre inintelligible ou changerait substantiellement son sens, causerait certainement son invalidité. Or un changement capable de rendre la forme inintelligible ou d'en modifier profondément le sens, peut se faire par addition, par omission, par transposition, par interruption ou par corruption. Mais le simple remplacement d'un mot par un autre strictement équivalent, ou la traduction dans une autre langue ou dans un autre dialecte, ne constitue pas une modification substantielle. Notons enfin que l'union de la matière et de la forme doit être telle que, eu égard à la nature de chaque Sacrement, l'ensemble du rite conserve sa signification et son unité morale.

* L'intention: Le Decretum pro Armenis définit qu'il est nécessaire à la validité d'un Sacrement que le ministre ait l'intention de faire ce que fait l'Eglise. Et le concile de Trente insiste "Si quelqu'un dit que dans le ministre, lorsqu'il effectue et confère un sacrement, il n'est pas requit qu'il ait l'intention de faire ce que fait l'Eglise, qu'il soit anathème."

2) La bonne intention.

L'intention peut être comprise comme un acte de la volonté par laquelle cette même capacité désire de façon efficace une fin en utilisant les moyens appropriés.

* Actuelle et virtuelle: L'intention nécessaire à la validité d'un sacrement doit être, actuelle ou virtuelle, la virtuelle étant la continuation de l'autre. Quand quelqu'un prend la décision de conférer un Sacrement, il a une intention actuelle. On parle d'intention virtuelle lorsque le ministre après avoir eu l'intention actuelle, a quelques distractions dans son esprit, cette intention est suffisante pour l’administration valide.

* Directe ou réflexe ? : L'intention, dans sa qualité peut être qualifiée de directe, ou réflexe, selon que le ministre réalise pleinement l'importance de son action, ou la produit sans être pleinement conscient de ses effets. Un prêtre qui, en baptisant un enfant, à le désir de le laver de la tache du péché originel et de donner la grâce sanctifiante, a une intention réflexe. Un prêtre qui reproduit simplement tout ce qui est prescrit dans le rite a une intention directe.

* L'intention indirecte: Les théologiens distinguent l'intention indirecte, où un homme désire une action, non en elle même mais dans sa cause. Comme celui qui, sous l'influence de la liqueur, produit un acte qu'il aurait fait sobre. Cette intention n'est pas suffisante pour la valide administration d'un Sacrement.

* L'intention: Pour comprendre la pleine signification de la déclaration du concile de Trente, nous devons noter que le concile déclare "ce que fait l'Eglise" et non pas "ce qu'elle souhaite". Conséquemment tout ce qui est nécessaire à l'administration valide d'un Sacrement est une intention directe, par exemple l'intention de reproduire le rite en usage dans l'Eglise Catholique ou parmi les chrétiens. D'ajouter une intention réflexe, que ce soit pour l'administration valide d'un Sacrement ou pour l'infusion de la grâce, serait faire dépendre la validité d'un Sacrement sur l'orthodoxie du ministre, une assertion qui est fausse.

3) Controverse.

Entre les théologiens, dure depuis longtemps une controverse sur l'intention ministérielle. Certains ont défendu une intention extérieure, d'autre une intention intérieure. Tout en étant d'accord sur l'enseignement de l'Eglise, la controverse dure encore aujourd'hui car si l'Eglise à fait des déclarations sur la nécessité de l'intention, elle ne s'est jamais prononcée clairement et directement pour ou contre l'intention interne ou externe. Aujourd'hui la majeure partie des théologiens défendent la position de l'intention interne, avec quelques variantes selon les écoles. Cependant, de mon propre point de vue, si on comprend l'intention comme un acte de la volonté, qui est une puissance de l'âme, ou ne peut que la considérer comme intérieure.

4) Conclusion.

En conclusion de mon étude, je déclare qu'il est idiot, malgré que cette opinion ait été soutenue par des prélats qualifiés comme Mgr Guérard des Lauriers, Mgr Thuc, ou le professeur Coomaraswamy, de douter de la validité des ordres de Achille Liénart, et de ceux de sa descendance, dont Mgr Marcel Lefebvre.

Pour finir voici l'opinion du Cardinal Franzelin:

"Le principe fondamental est le suivant : l'intention du ministre est requise non pour que le sacrement soit efficace, mais pour que le sacrement existe. Aussi, puisque l'intention générale et confuse de faire ce que fait l'Eglise, ou ce que les chrétiens ont coutume de faire au moyen du rite extérieur suffit pour que le sacrement existe, et puisque, l'existence du sacrement étant supposée, son efficacité lui vient de sa divine institution et est pleinement indépendante de la volonté du ministre, en conséquence le ministre qui a l'intention suffisante pour que le sacrement existe, ne peut par aucune volonté si opposée qu'elle soit exclure la sainteté, la puissance et l'efficacité du Sacrement."