Mère, je vous le donne

Monsieur Etchegarry, un ouvrier basque, a un fils de treize ans dont il désespère. En vain, il emploie douceur et sévérité. Rien à faire ! Martin ( c'est son nom ) ne se corrige pas. Méchant et entêté, il ose résister à son père.
Un jour, le père lui dit : " Suis-moi ! " Il conduit son fils dans une chapelle dédiée à Notre-Dame de Bonne Espérance, à deux kilomètres de la maison paternelle. Tout droit, il va devant l'autel, et la main posée sur l'épaule de son fils, il s'adresse à Marie :
"Mère, je viens vous le confier. Faîtes de lui un bon chrétien; ce qu'il n'a pas été jusqu'à présent. Qu'il soit votre enfant. Protégez-le". Puis, tombant à genoux, il continue à prier en silence. Des larmes coulent sur ses joues amaigries...
Près de lui, son fils, debout, ne bouge pas. D'abord indifférent et froid, puis embarrassé, il considère tantôt la Madone, tantôt son père qui prie avec ferveur.
Mais, que se passe-t-il en lui ? Lui aussi tombe à genoux. La prière et les larmes de son père sont tellement puissantes auprès de la Mère des Douleurs !
Pendant que les supplications de son père montent vers le Ciel, grâce et repentir descendent sur le fils.
Le silence du sanctuaire est troublé par un profond soupir. Etchegarry tressaille. La Mère des Douleurs l'aurait-elle déjà exaucé ?...
Martin commence à sangloter. Le front penché sur l'épaule de son père, il supplie ! "Père, pardonne-moi ! Père, pardonne-moi ! - Oh ! oui, je te pardonne " répond le père Etchegarry... Il saisit la main de son fils et lui montre la statue de Marie, en disant : "Sois digne d'Elle ! "
Les années passent. Martin a dix-sept ans. Il a expié les fautes de sa jeunesse. Sa conduite est exemplaire... Après une semaine de dur labeur, il dit un jour à son père : "Père, viens avec moi chez Notre Dame de Bonne Espérance" . Cette fois, c'est Martin qui d'un regard assuré et le front haut entre le premier à la chapelle. Il s'agenouille et prie à haute voix : "Mère, dîtes-lui ce que vous demandez de moi. Montrez-lui la place que vous me destinez. Faîtes-lui comprendre que vous voulez m'avoir tout entier, que je dois le quitter pour ensemencer d'autres champs que les nôtres. Dîtes à mon père que vous m'avez choisi, moi qui en suis indigne, pour devenir un oblat de la Mère de Dieu"...
Alors le père, d'une voix grave, interrompt son fils : "Ce que j'ai donné, je ne le reprends pas ! Béni soit le futur prêtre du Seigneur ! "
Maria siegt - 1952