Covid-19 : mieux décrire la protéine Spike pour améliorer le diagnostic et les perspectives vaccinales

La protéine Spike est la clé qui permet au SARS-CoV‑2 de pénétrer dans nos cellules. Elle est en outre l’une des cibles de notre système immunitaire face à l’infection, et celle de vaccins actuellement en développement. Il est donc crucial de la caractériser aussi finement que possible. C’est précisément l’objet du projet de recherche ProteoCovid-19, conduit au CHU de Montpellier par une équipe Inserm.

Depuis le début de la pandémie de Covid-19, une protéine du SARS-CoV‑2 fait l’objet d’une large attention : la protéine Spike (ou protéine S). C’est en effet elle qui permet au nouveau coronavirus de pénétrer dans les cellules humaines. De plus, elle est la cible d’anticorps produits par l’organisme après l’infection. Suite au séquençage complet du génome du virus, il a rapidement été possible de produire cette protéine clé en laboratoire : le gène correspondant a été intégré dans des cellules en culture, qui l’expriment et conduisent à la synthèse de la protéine virale. 

En pratique, il est possible que Spike ainsi produite (protéine alors dite « recombinante »), présente des différences biochimiques avec la même protéine virale produite en condition physiologique, au sein d’une cellule « naturellement » infectée par le SARS-CoV‑2. Ces différences, aussi minimes soient-elles, pourraient influencer l’efficacité des tests et vaccins à venir dont l’activité cible Spike. Mais elles sont très difficiles à mettre en évidence avec des appareillages conventionnels de recherche, et seules quelques équipes au monde disposent des moyens techniques innovants qui permettent de les identifier. Le laboratoire de protéomique clinique de Montpellier, dirigé par Sylvain Lehmann* est l’un d’eux : « La PCR, classiquement utilisée pour identifier le virus dans l’organisme, recherche le matériel génétique du virus. Dans mon laboratoire, nous utilisons la spectrométrie de masse : c’est une technique très performante, qui permet d’analyser directement les protéines virales, même lorsque celles-ci ne sont présentes qu’à des concentrations infimes dans les échantillons biologiques analysés », explique le chercheur. 

« Lorsque les cellules de notre organisme synthétisent des protéines, elles y apportent généralement des modifications dites post-traductionnelles, pour les rendre plus stables ou plus solubles dans le sang. La protéine Spike est ainsi glycosylée, c’est-à-dire que la machinerie cellulaire va y ajouter des sucres. Or, il n’est pas certains que la glycosylation opérée in vitro dans les cellules en culture soit identique à celle qu’opèrent les cellules humaines infectées in vivo. Il faut donc décrire avec précision la protéine synthétisée in vivo et la comparer avec la protéine recombinante obtenue in vitro, pour s’assurer que les tests diagnostiques et les vaccins qui l’utilisent comme cible sont les plus performants et les plus spécifiques possibles. »

Si ce travail est important dans le cadre du développement de vaccins et de tests sérologiques, il permettra en outre de mieux connaître la biologie du virus. Pour le mener à bien, l’équipe de Sylvain Lehmann travaille avec l’Institut Pasteur de Lille, qui fournit des virus purifiés, et avec une société, IDvet, dans la perspective de rendre un test diagnostique qu’elle a développé le plus sensible et spécifique possible. « La recherche avance très vite car une équipe britannique a publié ces derniers jours la structure biochimique de la protéine recombinante. Nous pourrons comparer leurs résultats avec notre description de la protéine présente chez les patients issus du CHU de Montpellier », s’enthousiasme le chercheur. 

Note :
*Unité 1183 Inserm/Université de Montpellier, Laboratoire de biochimie et de protéomique clinique (LBPC)