Ingérences étrangères : ce qu’il faut savoir sur Viginum

À quelques mois de la présidentielle, la France lance cette agence contre les manipulations de l’information. 50 personnes y travailleront d’ici janvier.

Par

Viginum devra « identifier des opérations impliquant (...) un État étranger ou une entité non étatique étrangère et visant à la diffusion (...) d'allégations ou d'imputations de faits manifestement inexactes ou trompeuses de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation ».
Viginum devra « identifier des opérations impliquant (...) un État étranger ou une entité non étatique étrangère et visant à la diffusion (...) d'allégations ou d'imputations de faits manifestement inexactes ou trompeuses de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation ». © NICOLAS ARMER / DPA / dpa Picture-Alliance via AFP

Temps de lecture : 3 min

Puisqu’il est « écrit », selon Emmanuel Macron, que l’élection présidentielle de 2022 sera marquée par des tentatives d’ingérences étrangères, il s’agit de les détecter et de s’en protéger. C’est l’ambitieux dessein de Viginum, une agence qui verra le jour en septembre. Le 12 janvier, en conseil de défense, le chef de l’État avait acté le principe d’une nouvelle structure, logée au sein du secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), rattaché à Matignon. Début juin, le patron du SGDSN, Stéphane Bouillon, avait annoncé sa création, mais son officialisation a été actée via un décret présenté mercredi 14 juillet, en conseil des ministres, par le Premier ministre, Jean Castex.

Le point du soir

Tous les soirs à partir de 18h

Recevez l’information analysée et décryptée par la rédaction du Point.

Votre adresse email n'est pas valide

Veuillez renseigner votre adresse email

Merci !
Votre inscription a bien été prise en compte avec l'adresse email :

Pour découvrir toutes nos autres newsletters, rendez-vous ici : MonCompte

En vous inscrivant, vous acceptez les conditions générales d’utilisations et notre politique de confidentialité.

« À l’instar de ses principaux partenaires européens et internationaux, la France renforce son dispositif de lutte contre la manipulation de l’information en se dotant d’un service destiné à protéger la démocratie contre les ingérences numériques étrangères », est-il écrit dans le compte rendu, où sont par ailleurs annoncées les dates de la prochaine élection présidentielle. Tandis que l’Union européenne a créé en 2015 East StratCom, une structure spécifiquement consacrée à lutter contre les manipulations en provenance de la Russie, et que le Royaume-Uni a récemment lancé le programme NSCT, la France paraît quelque peu à la traîne. Sous la pression d’une campagne massive de désinformation anti-française sur les réseaux sociaux, l’exécutif avait chargé la task force Honfleur de détecter et de caractériser l’origine de ces attaques. Viginum doit la remplacer et la compléter.

À LIRE AUSSI Scandale Pegasus : NSO, le côté sombre de la high-tech israélienne

À neuf mois de l’élection présidentielle, le risque est que cette agence passe pour un outil d’influence en ligne au service de l’exécutif. « Soyons bien clairs, il ne s’agit absolument pas pour nous de dire telle information est exacte, telle information est inexacte, a expliqué Stéphane Bouillon lors d’une audition à l’Assemblée nationale, le 2 juin. Ce que nous cherchons à faire, c’est voir qu’une information qui est en train de circuler et qui a une rapidité d’amplification très forte vient d’un pays étranger ou d’une organisation étrangère qui vise à déstabiliser sur le plan politique l’État. » Afin de promettre la « transparence totale », les travaux du responsable nommé à la rentrée seront encadrés par un comité d’éthique, qui comportera un membre du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), cinq personnalités proposées par les ministères des Affaires étrangères, de la Culture, de la Justice, de la Recherche et du Numérique, ainsi que deux journalistes sur proposition du ministère de la Culture.

Enjeu calédonien

« Cette structure peut apporter une réelle valeur ajoutée puisqu’il ne s’agit pas de statuer sur la véracité de telle ou telle information mais de déceler les processus d’amplification de fausses nouvelles ou de polémiques », note François-Bernard Huyghe, directeur de recherche à l’Iris et spécialiste de la cyberinfluence. Viginum aura au moins deux occasions de tester l’efficacité de se méthode pour traiter « ce qui est en train de devenir pandémique sur le plan informationnel » : les élections législatives allemandes en septembre et le dernier référendum pour l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie, fixé au 12 décembre. La menace qui plane sur la seconde échéance est à peine voilée : la Chine lorgne depuis plusieurs années les réserves de nickel du « Caillou » et aurait tout intérêt à favoriser son indépendance.

À LIRE AUSSI Phébé – Le jeu trouble de la Russie dans le cyberespace

Les 50 personnes mobilisées en janvier 2022, qui travailleront en « sources ouvertes », c’est-à-dire à partir d’éléments directs, veilleront à méticuleusement scruter les « allégations ou imputations de faits manifestement trompeuses de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation ». Il est toutefois possible que le problème ne vienne pas de l’étranger… mais de la France. Le ministère de l’Intérieur a réaffirmé que « la DGSI [Direction générale de la sécurité intérieure, NDLR] demeure seule compétente pour attribuer les manipulations à des puissances étrangères ». Derrière le risque d’ingérence étrangère, François-Bernard Huyghe voit déjà poindre un « petit problème bureaucratique français ».

À ne pas manquer

Ce service est réservé aux abonnés. S’identifier
Vous ne pouvez plus réagir aux articles suite à la soumission de contributions ne répondant pas à la charte de modération du Point.

0 / 2000

Voir les conditions d'utilisation

Commentaire (1)

  • KuboCar

    Est ce que les postes seront publiés ou attribués (j'ose pas dire, aux copains) ?