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29/07/2009

"Le Führer est inexorablement déterminé à anéantir les Eglises chrétiennes" (Josef Goebbels)

Extraits du dernier tome (paru) du journal du ministre de la Propagande du IIIe Reich :

+ un débat entre plusieurs d'entre vous sur la morale et la condition humaine


 

Tallandier complète sa publication du Journal de Josef Goebbels (1923-1945), avec les années 1939-1942. Comme les deux autres tomes (1923-1938 et 1943-1945), celui-ci est un recueil de symptômes  : étroitesse et mégalomanie, masochisme et fanatisme [1], émotivité et inhumanité, exaltation et nihilisme... Dans cette Weltanschauung pathologique n'existent ni vrai ni faux, ni  bien ni mal ; seulement le culte de la « volonté », exacerbé jusqu'à la dénégation hystérique du réel.

Si nous en parlons aujourd'hui, c'est sous l'angle de la christianophobie nazie. Le IIIe Reich se sent en guerre profonde et permanente avec les confessions chrétiennes, particulièrement avec l'Eglise catholique, et le Journal en donne d'innombrables exemples :



« 27 décembre 1939 -  Le pape a parlé à Noël. Discours plein d'attaques très sévères et dissimulées contre nous [2]. Toutes les forces de l'internationalisme sont contre nous. Nous devons les abattre. »

« 11 juillet 1941 -  C'est une honte de devoir constater que le clergé catholique ouvre moralement la voie à l'ennemi, avec la lettre pastorale [3] qui a été lue dimanche dernier dans toutes les églises catholiques. Comme nous avons pu le constater jusqu'ici, le clergé tente une première percée avec cette lettre pastorale, avant d'attendre notre réaction et d'en tirer les conséquences pour l'avenir […] C'est dans un autre domaine que nous allons présenter la facture au clergé catholique. Nous interdisons ses revues, nous refusons les quantités de papier et les ouvriers nécessaires à la publication de ses livres, et nous le privons ainsi, peu à peu, de tout impact. »

« 23 juillet 1941 -  Nous devons bien comprendre que l'Eglise catholique constitue une Internationale et qu'au moment critique, elle sera toujours contre nous. »

« 12 août 1941 – Je reçois chaque jour de nouveaux documents prouvant que la dernière lettre pastorale de l'Eglise catholique a eu des effets pratiquement dévastateurs aux Etats-Unis. Ces traîtres de l'Internationale noire mériteraient qu'on leur dépose la tête devant les pieds. »

« 23 octobre 1941 – Le SD me fait un rapport sur la situation où se trouve actuellement le pasteur Niemöller [interné à Dachau]... On affirme qu'il est en train de se convertir au catholicisme. Ce serait l'idéal ; car, dans ce cas, il ,ne serait plus un danger pour nous au sein du protestantisme, et nous avons de toute façon tellement d'opposants dans le clergé catholique qu'un de plus n'a aucune importance. »

« 14 décembre 1941 –  Le clergé est antinational. Il espère la défaite allemande, afin de pouvoir éliminer le national-socialisme […] Le Führer fait les plus grands éloges de la religiosité japonaise, que l'on peut assimiler au véritable esprit nippon. Dommage que nous n'ayons rien de semblable. Par toute sa conception et sa structure intellectuelle, le christianisme sera toujours opposé à une vision nationale forte. C'est que son essence même est entièrement marquée par le judaïsme... En réalité, le christianisme est une doctrine de la déchéance. Pour un homme moderne, il ne mérite que le mépris intellectuel... L'évêque Galen [4], de Münster, en est un exemple typique. Le Führer est déterminé à faire table rase... lorsque la coupe sera pleine, l'éclair de la colère s'abattra subitement sur ces traîtres de princes de l'Eglise. […] L'Eglise protestante s'efforce, elle aussi, d'imiter la catholique. L'évêque [luthérien] Wurm, du Wurtemberg, a l'ambition de devenir un deuxième Galen. Nous nous en sortirons vraisemblablement beaucoup plus facilement avec les protestants qu'avec les catholiques […] Je n'arrive pas à comprendre comment une personne pensant de façon moderne peut, dans l'absolu, trouver dans le christianisme une doctrine adaptée à notre époque. »

« 18 décembre 1941 – Les généraux les plus pieux sont ceux qui réussissent le moins... Raeder est trop pieux : c'est pour cette raison que notre marine est si mauvaise. »

« 24 mai 1942 – Le Führer est inexorablement déterminé à anéantir les Eglises chrétiennes après la victoire. Au cours de l'hiver passé, elles se sont comportées d'une manière tellement ignominieuse, avec une telle méchanceté, elles ont frappé dans le dos avec une telle lâcheté et une telle infamie une nation combattante qui vivait son heure la plus accablante, elles lui ont asséné un coup de poignard si sournois qu'aucune réconciliation n'est plus possible avec elles... Le Führer voit poindre dans ce contexte une crise idéologique de premier ordre, comparable uniquement à la fin de l'Antiquité. »

 

__________________

[1] Dans le vocabulaire de Goebbels, « fanatisme » est élogieux  - et « barbare » n'est pas péjoratif, simplement descriptif : une météo « barbare », une vitalité « fanatique », etc. [voir notre note de 2007 ici   > http://plunkett.hautetfort.com/archive/2007/04/04/de-goebbels-a-nos-jours-le-nihilisme-est-toujours-la.html ]

[2] Pie XII avait condamné « une série d'actes inconciliables aussi bien avec les prescriptions du droit international qu'avec les principes du droit naturel et même les sentiments les plus élémentaires d'humanité ». Allusion aux actes allemands envers les Polonais occupés, notamment juifs.

[3] Lue dans les églises le 6 juillet. Les évêques allemands déplorent les restrictions croissantes imposées à la vie religieuse et demandent aux croyants de rester fidèles à leur devoir de conscience et à leur foi. Ils leur interdisent « de jamais tuer des personnes innocentes ». En juin 1941, une circulaire de Martin Bormann aux Gauleiter (préfets nazis) a encouragé la réquisition des établissements religieux au profit du parti. Une vague de raids du parti et de la Gestapo a frappé 120 institutions, surtout des monastères.

[4] L'évêque de Munster, Clemens August von Galen, prononce en juillet-août 1941 une série de sermons contre l'action T4 (assassinat légal des malades mentaux). Philipp Bouhler, chef de la Chancellerie du Reich et initiateur de l'action  T4, réalise un film (Ich klage an, « J'accuse ») pour encourager l'euthanasie.

 

 

Ajoutons ceci, qui n'a pas de rapport avec ce qui précède, mais remet historiquement les choses à leur place : « 29 septembre 1942 – Nous devons avoir bien conscience que la France a capitulé à un moment où elle n'était pas encore tenue de le faire. » Voilà ce que Berlin pensait de l'armistice.

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00:38 Publié dans Histoire, Idées | Lien permanent | Commentaires (34) | Tags : christianisme

Commentaires

> ne serait-il pas préférable de dire:ils leurs imposent de (ne) jamais tuer des personnes innocentes plutot que: ils leurs ''interdisent'' de jamais tuer des personnes innocentes,

Écrit par : joly | 29/07/2009

> Merci pour cet excellent article.

Écrit par : anne | 29/07/2009

> Excellent article ! Merci !

Écrit par : Damien | 29/07/2009

JUSQU'OÙ

> Sans Dieu tout est permis.
Il est très intriguant de voir, quand l'homme nie le sacré, jusqu'où il est capable de détruire.
Ainsi l'homme n'existe que parce qu'il est moral (la preuve, c'est que lorsqu'il mit en place le programme amoraliste de Nietzsche, il créa de sa main les plus grands cataclysmes de l'histoire), et la morale n'existe - ou n'est justifiée - que par Dieu.
"Tous les principes moraux en l'homme abandonnés à ses propres forces sont conventionnels."

Écrit par : Marius | 29/07/2009

LA VERITE

> Merci pour ces extraits qui montrent à quel point l'Eglise fut un souci constant pour les dirigeants nazis, et la seule et quasiment unique force de réelle opposition. J'admire la qualité des responsables de cette tâche, mise en oeuvre avec constance et détermination par Pie XI et Pie XII à Rome et par le clergé allemand, en particuler les archevêques de Münster et de Münich, v. Galen et v. Faulhaber. Il est tellement regrettable que l'oeuvre soit si méconnue, voire si critiquée depuis 40 ans.
Heureusement que la vérité commence à ressortir.

Écrit par : pierre descheemaeker | 29/07/2009

"PHILOSOPHES"

> Cela confirme bien la nature profondément païenne et antichrétienne du nazisme. Malheureusement, il existe toujours des "philosophes" de salon comme Michel Onfray ou Richard Dawkins pour affirmer que le IIIe Reich et l'Église catholique œuvraient la main dans la main...

Écrit par : Jovanovic | 29/07/2009

LE P. FESSARD

> Une appréciation scientifique et historique de cette question et de son corollaire l'appréciation du nazisme dès ses débuts par les auteurs et penseurs chrétiens en particulier catholiques peut se lire sous la plume de Jean Chaunu " Christianisme et totalitarismes en France dans l'entre-deux-guerres (1930-1940) : Tome 1, Esquisse d'un jugement chrétien du nazisme", remarquable et récente synthèse.
En son temps et de façon précoce le caractère fondamentalement anti chrétien du national-socialisme avait été perçu par des auteurs comme Robert d'Harcourt " L'Evangile de la force" sur la jeunesse hitlérienne et "Catholiques d'Allemagne" sur la situation des catholiques en Allemagne,que les fréquentes exactions et des vexations quasi quotidiennes ravalaient au rang de citoyens de seconde zone. Sans oublier les écrits et ouvrages du philosophe et jésuite Gaston Fessard (Pax Nostrae ...) sur la pensée duquel il faut signaler l'excellent livre "L'anthropologie sociale du Père Gaston Fessard" de Frédéric Louzeau. On y découvre sa méthode d'analyse des situations politiques, bien utile pour notre temps, et la genèse de sa pensée sur la montée des différents totalitarismes. Est-il nécessaire de rappeler certains de ses parallèles entre fascisme, communisme et libéralisme?

Écrit par : Albert E | 29/07/2009

JAMAIS ENSEIGNEE

> Intéressant. Effectivement cette résistance de l'Eglise catholique n'a jamais été tellement enseignée. Le dernier point montre bien, si certains en doutaient encore, que la défaite de 1940 fut le résultat de la trahison d'une grande partie des élites françaises de l'époque. Finalement c'est encore un peu pareil maintenant ...

Écrit par : BCM | 29/07/2009

INTERROGATION

> Je me suis toujours interrogé sur les succès des livres sur le III° Reich. Les rayons des librairies en sont remplis et ça part...Le fin du fin pour ma part est représenté par l'auteur d'une enquête sur la bibliothèque d'Hitler pendant plusieurs années déclarant à la parution avoir trop souffert devant pareil sujet pendant trop de temps!
En passant M. de Plunkett, pourquoi prendre pour vérité historique ce que déclare Goebbels le 29 Septembre 1939 sur l'armistice?
drazig

[ De PP à D. - Ce que Goebbels dit sur l'armistice témoigne de ce qu'en pensaient les dirigeants du IIIe Reich. ]

Cette réponse s'adresse au commentaire

Écrit par : drazig | 29/07/2009

CE QU'IL ECRIT DE FRANCO

> Autres extraits fort intéressants, qui nous amènent à nuancer un peu (un peu seulement) le récit classique de la guerre d'Espagne: les bons Républicains contre les méchants fascistes en harmonie totale avec Mussolini et Hitler:

p. 272: Le Fuhrer n'a pas la moindre estime pour Franco. Un paon vaniteux et écervelé. Il n'a aucune place parmi les grands hommes d'État.

p. 371: Il s'agit d'un général réactionnaire, pas d'un militaire.

p. 531: Franco est une nullité. Sa politique suit une trajectoire en zig-zag et louvoie perpétuellement. On peut seulement regretter que nous ayons utilisé nos armes pour placer au pouvoir une telle non valeur (en français dans le texte)

(Joseph Goebbels , Journal 1939-1942, Tallandier, Paris 2006)

L'histoire est vraiment quelque chose de compliqué...

gondrand

[ De PP à G. - Surtout si l'on se souvient que, depuis "Mit brennender Sorge", le "Movimiento" franquiste interdisait la diffusion en Espagne des documents du Vatican susceptibles de critiquer le IIIe Reich ! ]

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Écrit par : gondrand | 30/07/2009

@ PP dans sa réponse à Gondrand

> Reste que Franco, quelles que soient ses turpitudes (et elles sont grandes !) a eu la sagesse, après la saignée de la guerre civile espagnole, de tenir l'Espagne hors du conflit et de maintenir la neutralité de l'Espagne pendant la 2ème guerre mondiale !

Écrit par : Michel de Guibert | 30/07/2009

A MGB:

> sagesse ou réalisme? En 1940, toute personne un peu intelligente et honnête intellectuellement pouvait voir que rien n'était joué. Le pacte germano-soviétique était vraiment contre nature et l'on pouvait se demander combien de temps il tiendrait. Quant à l'attitude isolationniste des USA, elle aussi pouvait évoluer quant on se souvient de leur intervention tardive en 1917. Bref, je pense pas que Franco fut sage mais seulement prudent et cynique. Sans parler de la volonté d'éloigner une Allemagne qui transforme ses alliées en vassaux (cf l'exemple de l'abaissement de Mussolini que Franco a aussi observé).

Écrit par : vf | 30/07/2009

A Marius,

> Comment justifiez-vous l'islamisme, source de destruction de nombreuses vies humaines et de dictature partout où la charia a été instaurée ? En quoi ces hommes nient-ils le sacré puisqu'au contraire ils s'en prévalent ?

Écrit par : delauney | 30/07/2009

NEUTRE ?

> oui
mais un grand nombre du clergé est resté tout du moins neutre...
unnouveaucompte

[ De PP à UNC - Sur l'Allemagne de cette époque, vous devez avoir des informations que Goebbels n'avait pas. ]

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Écrit par : unouveaucompte | 03/08/2009

RUMEUR

> je pose une simple question, d'où vient alors cette rumeur persistante ? légende urbaine ? actes plus mitigés sur le terrain ?
Jerome Chesnot

[ De PP à JC - La rumeur n'est pas venue des historiens (*) mais des milieux politico-médiatiques des années 1970-1980. Est-ce un élément d'explication ? je ne sais pas.
(*) Ceux-ci ont établi que la région qui vota (proportionnellement) le moins pour le NSDAP fut la Bavière catholique, en dépit - précisément - de la rumeur. On en trouve l'écho dans les carnets de Goebbels, quand il compare les milieux catholiques allemands aux milieux protestants allemands.]

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Écrit par : Jerome Chesnot | 03/08/2009

SANS DIEU, QUOI ?

> Bonjour M. / Mme Delauney,
Je ne justifierai pas l'islamisme et la charia, je ne suis pas musulman et ne me sens donc pas tenu de le faire. Je reformulerai en revanche plus généralement votre question ainsi : comment ce fait-il que des injustices aient été provoquées par des croyants et au nom même de la religion, donc par des gens qui affirment le sacré ?
Mon assertion est que toute morale ne peut, fondamentalement, se justifier qu'en Dieu. C'est bien le point de Nietzsche et de Dostoievski, qui se rejoignent à partir de deux perspectives différentes : le premier écrivait, à propos de la morale chrétienne : "Le christianisme est un système, une vision des choses totales et où tout se tient. Si l'on en soustrait un concept fondamental, la foi en Dieu, on brise également le tout du même coup : il ne vous reste plus rien qui ait de la nécessité" (Crépuscule des Idoles). Le dernier ajoutait : "Tous les principes moraux en l'homme abandonnés à ses propres forces sont conventionnels." (notes des "Possédés").
Qui peut raisonnablement le nier ? Ou bien prouvez-moi l'existence de la morale : vous verrez que vous ne prouverez en définitive que l'existence de coutumes, de lois, d'usages, bref de conventions, qui divergent en fonction des lieux, du temps, de l'air du temps, et qui sont absolument contingentes à la bonne volonté de l'homme. Pour toutes ces conventions, il suffit d'un Nietzsche pour les réduire à néant.
Il ne peut donc exister de morale athée, ou alors conventionnelle et non fondée, comme il n'existe pas de morale à l'état de nature chez les bestioles. Chacune fait selon son espèce, et il ne viendrait jamais à l'esprit d'un biologiste de donner une valeur morale à l'acte d'une bestiole. Et si l'on est athée, on doit admettre l'homme au même rang que la bestiole.
Mais pour revenir à la foi en Dieu, en paraphrasant Kant on pourrait distinguer une morale pure d'une morale pratique.
1) La morale pure, objective, n'est qu'en Dieu. Elle est le fondement de la morale pratique, qui serait par Dieu.
2) la mise en pratique de cette morale dépend entièrement de l'homme : de l'idée qu'il a de Dieu, et de sa volonté de se conformer à Dieu et à sa loi.
Pour le chrétien cela se traduit ainsi : c'est la loi de l'Amour d'où découle toute la morale chrétienne - mais cette loi n'est justifiée que parce que le chrétien a foi que Dieu EST amour). Cette loi est invariable dans le temps et l'espace, comme Dieu est immuable.
Conclusion :
Dieu est la source de la morale, mais à charge pour les hommes de l'appliquer. Le résultat final n'est pas toujours édifiant il est vrai, la faute souvent à l'idée - faussée - que l'homme se fait de Dieu.
En revanche si on nie Dieu, alors la cohérence exige qu'on nie aussi la morale. Dès lors, rien ne s'oppose aux lois raciales du III° Reich.
Un scène du film "Sophie Scholl, die letzen Tage" est à ce titre très éclairante. Robert Mohr, commissaire de la Gestapo, l'interroge : "à quoi nous fier si ce n'est la loi ?" Sophie Scholl de répondre : "à la conscience. La loi change, non la conscience."
Elle ne peut affirmer cela que par sa foi en un Dieu éternel. Si Dieu n'existe pas, alors Robert Mohr a raison, et les lois raciales du III° Reich sont justifiées au même titre que n'importe quelle autre.
Je vous retournerai donc la question : "qu'est-ce qui vous fait penser que la charia est immorale, et l'avortement parfaitement moral ?" Rendez-moi raison de l'immoralité de la charia sans Dieu : sur quel critère objectif vous fiez-vous pour affirmer la morale ou l'immoralité d'un acte ?

Écrit par : Marius | 03/08/2009

HITLER, LES PROTESTANTS ET LES CATHOLIQUES (ALLEMANDS)

> "La comparaison de la carte de la répartition des catholiques et des protestants en Allemagne, avec la carte des votes nazis, dans les années 1932-1934, ne laisse place à aucun doute. C'est canton par canton, dans toute l'Allemagne, les régions à majorité protestante qui ont donné aux au nazisme ses votes majoritaires. Ces cartes peuvent être consultées notamment dans l'ouvrage de Koenheldt-Leddihn, "Liberty and Equality" (Londres 1952). Joachim Fest, le récent biographe de "Hitler" (Paris 1973), le constate aussi : l'Allemagne protestante du Nord a fourni au nazisme son "tronc électoral le plus fort et le plus sûr" (t. I, p. 416.) Et le spécialiste français Jean de Pange, note que, lors du plébiscite qui a fait Hitler le Führer (19 août 1934), si "la proportion des non est seulement de 4% au coeur de la Prusse protestante, elle s'élève à plus de 25% à Cologne, à plus de 40% à Aix-la-Chapelle", villes catholiques ("Vues sur l'histoire de la Rhénanie", Le Rhin, Nil de l'Occident, Paris 1947, p. 48.) Ce qui n'empêche pas Alain Peyrefitte, fasciné par son fantôme "romain" catholique, d'écrire que l'hitlérisme, par l'autrichien Hitler (en fait lui-même violemment anticatholique dès son adolescence), fut le produit de "la partie la plus romanisée du Saint-Empire" (Le Mal français, p. 146.)..."
(Source : Jean DUMONT, L'Eglise au risque de l'histoire, préface de Pierre Chaunu de l'Institut, Editions de Paris, Ulis 2002, p. 84, note 1.)

Écrit par : Michel de Guibert | 03/08/2009

@ Marius

> Le sens moral est antérieur à la religion, puisqu'il sert de "boussole" pour interpréter les écrits religieux. Le clergé lui-même le reconnaît lorsqu'il demande de lire certains passages de la Bible (de l'Ancien Testament notamment) en termes allégoriques, vu le nombre de crimes qui y sont prescrits et commis au nom de la religion. Sur quoi se baser pour discerner, dans la Bible, les principes moraux acceptables et ceux qui doivent être rejetés, si ce n'est sur un sens moral d'ordre supérieur à la religion ?
La religion s’appuie sur le sens moral, et non l’inverse.
L’empathie, la réciprocité, le sens de l’équité, ainsi que le respect des règles et de la hiérarchie, existent déjà dans le monde animal et sont le résultat de millénaires d’évolution dans un environnement “social”. Les lois, les gendarmes, les châtiments, les juges, les religions, … ne font que mettre en application et renforcer ce sens moral et les règles de vie en société.

Écrit par : Yogi | 05/08/2009

1940

> Entendu M. de Plunkett; seulement (pour revenir sur mon commentaire du 29.07.2009) il me semble que cet armistice a "empêché" l'invasion de l'Afrique du Nord atout stratégique majeur. Les guillemets peuvent être interprétés à volonté: remise à plus tard, mauvais calcul d'Hitler... D'autant plus que la mauvaise volonté de Franco pour la traversée de l'Espagne représentait un obstacle. Bref, l'Histoire est si complexe...

Écrit par : drazig | 05/08/2009

RIEN À SAUVER DE VICHY

> à Drazig - En 1940, l'armée allemande n'avait pas les moyens d'envahir l'Afrique du Nord. Ne pouvant passer par l'Espagne, il restait la mer et la flotte française était largement supérieure à celle de l'Allemagne. Cette histoire du sauvetage de l'empire par l'armistice est un des grands arguments (mensonge) de la propagande de Vichy en faveur de l'armistice. De plus, de quel atout stratégique majeur parlez-vous ? L'armée allemande n'est pas arrivée à défendre le littoral atlantique et s'est diluée dans l'immensité russe. Alors, imaginez les frontières de l'empire en Afrique et l'étendue de ce continent! Les Alliés auraient pu débarquer où ils le voulaient sur le continent et attaquer où ils le souhaitaient depuis leurs colonies en Afrique. La reconquête aurait peut-être été plus longue mais néanmoins inéluctable. A la réflexion, la capitulation apparaît vraiment comme une trahison de nos élites politiques qui fut suivie par leur collaboration la plus abjecte car justifiée, pour la majorité d'entre-eux, par la lâcheté et non par l'adhésion à l'idéologie du vainqueur. Non, il n'y a rien à sauver de Vichy. Absolument rien.

Écrit par : vf | 05/08/2009

@ Marius

> Vous avez réussi, dans votre commentaire, à accumuler tous les clichés qu'un chrétien peut empiler dans une discussion.
- "Pour un athée, l'homme est au même rang que la bestiole, il n'y a pas de morale, et tout est permis": c'est de l'ordre du préjugé, ni plus, ni moins. Des amis athées avec une conscience morale très développée, je vous en présente quand vous voulez. Et il n'y avait pas besoin d'être chrétien pour être farouchement opposé au nazisme et pour être résistant, par exemple.
- Qu'est-ce que l'avortement vient faire là-dedans? L'IVG, c'est un peu le point Godwin des chrétiens: on peut discuter de tout, et surtout de ce qui n'a aucun rapport avec ça, on est quand même sûr que ça va arriver sur le tapis à un moment ou à un autre.
Dans tout ça, la discussion perd en qualité.

Écrit par : Mahaut | 05/08/2009

@ Mahaut

"Et il n'y avait pas besoin d'être chrétien pour être farouchement opposé au nazisme et pour être résistant, par exemple" : non seulement ça, mais vous aviez des chrétiens engagés à mort dans la collaboration. Exemples : Philippe Henriot, la voix de Radio Paris, l'orateur milicien, qui était avant la guerre l'un des chefs de file de... la Fédération nationale catholique, mouvement qui eut plus de représentants dans la LVF que les partis pronazis eux-mêmes. C'est là qu'on voit dans quelle confusion mentale baigne un certain militantisme identitaire catho. Hier au nom de "l'anticommunisme". Aujourd'hui, au nom de quoi ?

Écrit par : Servus | 05/08/2009

Yogi,

> Vous dites "la religion s’appuie sur le sens moral, et non l’inverse", comme si le "sens moral" allait de soi comme l'instinct de migration chez certains oiseaux. Or le sens moral ne va pas de soi, puisque telle chose est considérée comme un bien à un endroit et une époque donnée, et un mal ailleurs ou dans un autre temps. Quant à la religion, elle justifie la morale, le bien et le mal, en lui donnant un principe transcendant. Ce qu'elle entend par ce principe transcendant et ce qui en découle comme morale est un autre problème (c'est à dire : la religion en question parle-t-elle de Dieu ou d'une idole ?). Quoiqu'il en soit, même Voltaire et Rousseau reconnaissaient la nécessité d'un principe transcendant pour fonder la morale (si Dieu n'existait pas, il faudrait l'inventer etc.)
Vous faites ensuite une confusion il me semble entre la morale d'une part, le légal et les règles de vie en communauté d'autre part ; je vous invite à réfléchir sur la différence de ces notions, par exemple en relisant "Antigone". Par ailleurs, qu'est-ce qui prouve et vous fait dire que l'empathie, l'équité etc. soient de l'ordre de la morale ? Rien. VOUS jugez que l'équité est une chose morale, un bien. Certains rétorquent : "simples préjugés". Rien n'empêche alors d'autres d'affirmer que seule que la loi du plus fort, du plus apte, est morale. De fait, la part du lion n'est ni morale ni immorale : elle est simplement amorale, tout comme la nature est aveugle moralement : elle n'est QUE nécessité et QUE hasard - c'est du moins la thèse athée scientifiquement admise. L'empathie n'est pas une nécessité pour survivre, l'équité non plus, puisque certaines espèces se passent très bien de ces valeurs. Donc, à supposer que l'on prouve scientifiquement que telle espèce d'animale est "empathique" ou "équitable", je ne vois pas en quoi cela relèverait de la morale plus que de dire que telle espèce d'animale est dotée de sonar, ou de la faculté d'homotypie ou d'homochromie ou que sais-je, et qu'ainsi elle serait "mieux" que telle autre espèce qui ne serait pas dotée de ces qualités.

à Mahaut :
Je ré-explique :
1) Voilà ce qui est de l'ordre du "préjugé" : la morale. Du moins sans Dieu, la morale EST un préjugé. Je ne peux que vous conseiller de lire Nietzsche (Généalogie de la Morale, Par delà Bien et Mal) si vous n'en êtes pas convaincue - ne serait-ce que pour la qualité de la discussion, car si vous voulez réfuter ce point, il vous faudra par nécessité réfuter Nietzsche. Bon courage.
2) Je ne nie pas la possibilité à vos amis athées d'avoir une conscience morale plus développée que certains chrétiens, cela est des plus vraisemblables. Je dis simplement : comment peuvent-ils - et pouvez-vous - le dire ? Quels sont leurs critères objectifs ? Comment peuvent-il rendre raison de cette morale, c'est à dire me prouver en définitive en quoi et pourquoi les valeurs qu'ils pratiquent sont dites morales et meilleures que les autres qui ne le sont pas - pourquoi appellent-ils telle valeur "bien", et une autres "mal", et pourquoi je ne peux dire que ce qu'ils trouvent un bien est pour moi un mal et vice-versa ?
Dire que la morale n'existe pas sans Dieu, cela ne signifie pas qu'on ne peut avoir de valeurs si on est athée ; simplement il n'y a aucun moyen de les prouver meilleures ou pires que d'autres et de les justifier objectivement. Par ex qu'est-ce qui fait dire que l'avortement est un "bien" et la charia un "mal" ? Qu'est-ce qui fait dire qu'aider son prochain est un "bien", et éliminer un être socialement inutile, parasite ou concurrent comme on élimine une vieille vache plus rentable, un "mal" ? On peut être résistant athée au nazisme au nom de ses propres valeurs morales, et approuver en même temps l'IVG. Impossible pour le chrétien : il ne peut qu'être contre le nazisme ET contre le massacre de 200 000 vies humaines par an en France s'il veut être fidèle et cohérent à ce qu'il croit, au nom d'une même et unique morale qui le dépasse et s'applique partout, par tous, en tout temps, puisqu'elle a son principe en Dieu.
=> encore une fois donc, sans Dieu, la morale, le Bien et le Mal, tout cela n'est que blabla, conventions, us et coutumes, préjugés ; des notions "dont rêvent épiciers, chrétiens, vaches, femmes, anglais et autres démocrates." (je vous laisse deviner d'où vient cette phrase.)
3) Et oui, si on est athée et cohérent, l'homme n'est qu'une bestiole au même titre qu'une autre. Je ne vois pas comment il en serait autrement. Donc si vous êtes athée et cohérent, soyez amorale (je ne dis pas obligatoirement immorale) mais ne jugez pas l' "a-morale" de Goebbels parce que lui même peut affirmer que votre "morale" ne vaut rien ; sinon, si vous croyez qu'il existe une morale objective, soyez aussi cohérent et croyez en Dieu.

Écrit par : Marius | 09/08/2009

@ Marius :

> Je note tout d’abord que vous ne répondez pas a la question de savoir sur quoi se baser pour discerner, dans la Bible, les principes moraux acceptables et ceux qui doivent être rejetés, si ce n'est sur un sens moral d'ordre supérieur à la religion.
Ensuite, la nature n’étant que nécessité et que hasard, chaque espèce animale qui y a prospéré l’a fait en s’appuyant sur ses propres forces et en construisant ses propres règles. Il se trouve que les primates doivent leur survie à leur mode de vie en société, lequel requiert empathie, réciprocité, sens de l’équité, respect des règles et de la hiérarchie. Ce n’est donc pas moi qui dis que cela est le bien ou le mal, se sont là simplement les règles par lesquelles l’homme a pu se faire une place dans l’évolution, et elles lui sont consubstantielles comme le sonar pour d’autres espèces.
Je vous invite à ce titre à vous familiariser avec l’anthropologie et l’éthologie, ce qui vous permettra de réaliser que les connaissances et la pensée ne se sont pas arrêtées à Voltaire et Rousseau.

Écrit par : Yogi, | 14/08/2009

à Yogi :

> pour l'homme seul, déterminer ce qui est objectivement bien ou mal, y compris dans l'Ancien Testament, est évidemment impossible. Il lui faut des critères objectifs.
Je vous cite : "Ensuite, la nature n’étant que nécessité et que hasard, chaque espèce animale qui y a prospéré l’a fait en s’appuyant sur ses propres forces et en construisant ses propres règles."
=> nous sommes donc d'accord que la morale n'existe pas à l'état de nature, puisque celle-ci n'est QUE hasard et QUE nécessité. Or la morale est parfaitement étrangère à la fois au hasard et à la nécessité : sinon cela signifierait que toute espèce est morale ; ce qui revient de fait à dire : toutes les espèces sont amorales.
Et vous dites : "construisant ses propres règles". Là aussi je suis d'accord : si la nature n'est QUE hasard et QUE nécessité, les règles (mais on ne parle toujours pas de morale) relèvent du simple "culturel" uniquement. Si les règles se construisent, on peut fort bien les dé-construire et en re-construire d'autres. Ce que firent nombre de législateurs, de Solon et Lycurgue à de Gaulle en passant par Gengis Khan, Napoléon, Lénine et Adolf Hitler.
En outre votre théorie de la "morale" chez les primates ne relève en rien de la nécessité, mais du simple "culturel". Certains primates s'en sortent très bien sans empathie, ni réciprocité ou même sens de l'équité - quand bien même prouverait-on scientifiquement que l'on parle bien de ces sentiments respectifs et non d'une apparence d'équité etc.
D'autre part il faudrait ensuite prouver que ces sentiments sont effectivement moraux. Sur quels critères les jugez-vous moraux, puisque le sens de l'équité n'est visiblement pas le même chez le lion ou le protozoaire que chez tel primate ? Donc, de quoi parle-t-on au juste ? Vous plaquez ici un mot que vous entendez d'après votre propre acception et expérience vécue (ou allez vous nier Freud aussi ?), sur une espèce dont elle n'a absolument aucune notion. Et si donc telle guenon n'a aucun sens de l'équité, je dois la juger pour cela "immorale" ? Évidemment non, je constate qu'elle n'a pas le sens de l'équité selon l'idée que je me fais moi de l'équité, mais je me garde de tout jugement de valeur sur une bestiole. Or la morale, c'est essentiellement en pratique une question de jugement de valeurs.
Quant aux respects des règles et de la hiérarchie, je ne vois pas ce que cela vient faire dans la morale. A ce compte-là tous les SS sont moraux, et Goebbels est parfaitement moral.
Enfin vous nous parlez des "règles par lesquelles l’homme a pu se faire une place dans l’évolution, et elles lui sont consubstantielles", mais c'est une pure rigolade ! Chacun voit bien que ces règles n'ont rien à voir encore une fois avec la morale mais avec de simples contingences spatio-temporelles. Bis repetita placent, règles et morale ne sont pas la même chose. Si c'était le cas, tout le monde aurait le même code pénal - et même la loi positive serait positivement inutile - et on ne verrait pas dans ces législations autant de fatras contradictoires.
En bref, vous nous parlez visiblement d'un monde et d'un homme qui n'existent pas, en tout cas vous ne nous parlez jamais de morale - guère que de règles ou de comportements animaux, dont on se gardera bien de dire s'ils sont bien ou mal, meilleurs ou pires.
Cela n'est guère étonnant, puisque vous nous parlez d'anthropologie et d'éthologie, deux sciences qui n'ont rien à avoir avec la morale, qui est la "science" du discernement du bien et du mal. Ou alors dites nous en quoi Goebbels est immoral anthropologiquement et éthologiquement, plus que par exemple le Mahatma Ghandi.
Dieu seul permet de fonder la morale objectivement et de dire : ceci est bien, ceci est mal ; ceci est permis, ceci est défendu. Si absence de Dieu, alors absence de morale, alors Goebbels est aussi amoral que Ghandi, les lois nazies aussi morales que celles du Christ. Tout le reste ne sont que contorsions de cerveau pour construire un pseudo christianisme sans le Christ, une nouvelle religion sans Dieu. Bref, vous n'assumez pas votre athéisme : vous avez besoin de croyance, vous avez besoin de stable à mesure de votre instabilité, mais votre garde-fou est fixé dans le néant, et votre boussole pointe vers vos désirs, non la réalité. Le plus drôle, c'est que vous vous référez inconsciemment à une morale qui mit des millénaires à se révéler telle qu'elle est. Pour une chose qui serait soi-disant consubstantielle à l'homme, votre théorie n'est pas très performante.

Écrit par : Marius, | 15/08/2009

@ Marius

> Eh bien je crois que vous nous faites là une série de contresens véritablement impressionnante, qu'il va falloir essayer de démêler.
Tout d'abord, dans le cadre de l'évolution, chaque espèce sociale co-évolue avec les règles qui régissent sa société, et qui dépendent à leur tour des caractéristiques physiologiques de l'espèce. Avec nos fortes capacités de communication et d'anticipation, et nos faibles capacités physiques individuelles, les groupes humains de coopération se sont soudés autour de l'empathie, de la réciprocité, du sens de l'équité et du respect de la hiérarchie, comme on l'observe chez les primates qui nous sont proches. C'est tout cela que nous avons conceptualisé sous le nom de "bien", de "mal", et de morale.
La morale est donc bien un pur résultat du hasard et de la nécessité, et c'est pour cela que nous n'avons pas la même que les termites.
Ces PRINCIPES moraux généraux ont ensuite été déclinés sous de multiples formes plus ou moins détaillées et contingentes, il est bien évident que nous sommes loin ici des codes pénals.
Les religions se sont pour leur part approprié ces principes, ou plutôt, les religions les plus compatibles avec ces principes se sont assuré les meilleures chances de propagation.

Écrit par : Yogi, | 15/08/2009

@ Marius

Votre réponse à Yogi est parfaitement convaincante;;. Néanmoins, attention! l'empathie n'est pas spécifiquement humaine. Il ne faut pas la confondre avec l'amour filial, interpersonnel. Le psychologue John Bowlby et l'ethologue Robert Harlow ont montré la nécessité vitale de l'empathie chez l'enfant, mais aussi chez le petit du singe ou le petit de l'oie. Pour survivre, l'individu qui vient de naître a besoin d'une "figure d'attachement". Ce n'est que progressivement qu'il pourra conquérir son autonomie, et se passer de la présence sécurisante de sa mère. Celà, c'est une donnée biologique et non pas morale.

Écrit par : Blaise, | 16/08/2009

@ Mahaut

> Nous avons tous des athées parmi nos proches – des amis voire des parents. Et nous pouvons apprécier leur attitude morale individuelle. Sur plusieurs points nous pouvons même partager des engagements moraux que méconnaissent d’autres personnes cataloguées "catholiques ", tels que maintenir le dimanche. Ce dernier exemple, assez banal, est un exemple vécu et concrétisé en action, c’est pourquoi je le cite. Mais l’athéisme n’est pas simplement une conviction individuelle. Il fait système, il a un impact social – même sur les croyants.
Dans une conférence – disponible sur le site de Canal-u –, Rémi Brague disait de la morale qu’elle était le « kit de survie de l’humanité ». L’interdit de l’inceste, du parricide, de l’adultère et du vol est universel. Mais le diable est dans les détails ! ainsi, de manière significative, la « fraternité » est un concept chrétien ignoré des anciens, et tardivement ajouté à la devise républicaine. Lorsque le Christ incitait ses disciples à reconnaître leur prochain dans tout homme, ses paroles ne devaient pas tellement surprendre des juifs accoutumés aux Ecritures. Par contre, les païens c’est une autre affaire… Avez-vous remarqué à quel point les hommes deviennent insensibles à leur prochain quand celui-ci n’est pas des leurs ? c’est une tendance de fond, et les choses ne s’améliorent pas. René Girard a bien mis en évidence que l’individu « sacrifiable » est justement le marginal, l’étranger, celui qui est privé du réseau d’alliances qui assurerait sa protection. Ainsi une jeune fille comme Iphigénie, encore sans statut social car n’étant pas encore mariée, et n’ayant pas eu d’enfants – était-elle « sacrifiable ». Et que dire des crimes d’honneurs ? il s’agit pour le père, le mari ou le frère de tuer sa fille, sa femme, sa sœur ! de tels actes dérivent d’une hiérarchie des valeurs implicite : le meurtre devient un devoir lorsqu’un membre de sa famille a « déshonoré » celle-ci. – ce « déshonneur » est donc un crime encore plus grave. Et, bien sûr, le pardon est assimilé à une faiblesse. Les crimes d’honneur pourraient d’ailleurs être également considérés comme universels, malgré leur moralité douteuse d’un point de vue chrétien. L’islam ne les a certainement pas inventés, et les européens les ont largement pratiqués.
Alasdair MacIntyre a souligné que les vertus célébrées n’étaient pas toujours les mêmes suivant les sociétés. Je le reprends ici :
– Dans la société homérique les vertus reconnues pour un homme étaient le courage, la ruse et l’amitié. L’homme vertueux était donc quelqu’un sur lequel sa famille, ses alliés pouvaient compter. Il ne flanchera pas, il ne trahira pas. Les autres, les étrangers, c’est différent… En revanche à l’époque de la cité athénienne la ruse pour l’emporter sur ses ennemis était de moins en moins considérée comme une vertu, et la polis entrait en conflit avec la parenté comme lieu d’exercice des vertus : il suffit de penser à l’aristocrate Alcibiade… Enfin, la dignité s’étendait désormais à l’ensemble des citoyens.
– Dans le catalogue des vertus chrétiennes, je cite le Catéchisme de l’Eglise catholique, « les vertus théologales fondent, animent et caractérisent l’agir moral du chrétien. Elles informent et vivifient toutes les vertus morales. » Elles sont au nombre de trois : la foi, l’espérance et la charité. L’homme accueille la foi, s’enracine dans l’espérance et s’accomplit dans la charité. Si la foi ne conduit pas à la charité, ce n’est plus la foi. Mais la charité tout comme la fraternité (qui n’est pas la fratrie) était inconnue des anciens et n’est pas mieux acceptée des nietzschéens contemporains. Le pardon – qui est la conséquence de la vertu de charité – était considéré par les anciens comme une faiblesse condamnable. Le coupable ne pouvait être un objet d’amour puisqu’il s’en était rendu indigne par ses actes. Ajoutons que l’humilité était plutôt cataloguée comme un vice par Aristote, qui pensait d’ailleurs que l’exercice de la vertu n’était pas donné à tout le monde…
– Pour les chrétiens, la charité est centrale : il suffit d’ouvrir les "Actes". Aujourd’hui, dans notre société libérale, l’agir moral est surtout régi par le principe utilitariste. Malgré les « bons sentiments » de beaucoup de « braves gens », c’est un fait. Ce qui est logique : le principe utilitariste permet de concevoir une morale rationnelle et autonome, complètement indépendante de Dieu. L’utilitarisme était aussi le principe sacro-saint du nazisme et du communisme, Etats athées par excellence : on voit les résultats de leur morale.
Voilà ce que je cherche à dire : la morale est universelle, mais elle est méconnue par l’homme muni de sa seule raison, et privé de la lumière de la foi. Pécheur, vivant dans un milieu social et familial marqué par le péché, sa compréhension du bien et du mal est inévitablement déformée. Et c’est pourquoi nous pouvons être assurés de la miséricorde toute particulière de Dieu envers les non-chrétiens.

Écrit par : Blaise, | 16/08/2009

@ BLAISE

> Vous dites : "Avez-vous remarqué à quel point les hommes deviennent insensibles à leur prochain quand celui-ci n’est pas des leurs ? c’est une tendance de fond, et les choses ne s’améliorent pas." Et aussi : "Si la foi ne conduit pas à la charité, ce n’est plus la foi." Trop vrai ! Que pensez-vous de ça : un groupuscule invente de proposer aux SDF une soupe gratuite mais contenant ostensiblement du porc, pour empêcher les SDF musulmans d'y toucher. Cette "soupe au cochon" est ensuite approuvée par des sites se prétendant catholiques... Voilà des "chrétiens" crachant à la face du pauvre, c'est-à-dire du Christ.

Écrit par : assekrem, | 16/08/2009

@ assekrem

> Et il paraît - on lit ça dans La Croix - que les agressions contre des sans domicile fixe sont devenues un jeu national aux Etats-Unis. La mortalité ne cesse de monter, proportionnellement au mépris que suscitent ces gens. Ils n'ont pas de fric, donc ils sont moins que rien. Voilà le raisonnement sous-jacent, je pense. Les agresseurs s'amusent, paraît-il, à filmer leurs exploits et à les mettre sur internet.
La notion de dignité de la personne humaine devient de plus en plus évanescente dans le monde occidental.

Écrit par : Blaise, | 16/08/2009

@ Blaise :

> Il me semble en effet qu'une grande innovation du Christ a été d'étendre l'amour du prochain à tous les hommes : les fondements biologiques de la morale, reflétés par nombre de langues primitives, poussent à ne considérer comme "êtres humains" que les membres de la famille ou du clan.
Par ailleurs vos appels aux Anciens ou à l'universalité me paraissent extrêmement centrés sur un minuscule lopin occidental : comment prétendre raisonner sur l'être humain sans jamais se référer aux cultures indiennes, chinoises, africaines, aborigènes, aztèques, j'en passe et des meilleures ?
De même, mêler la notion de péché aux débats sur la morale, c'est là encore me semble-t-il renoncer à toute ambition d'universalité pour se placer dans une pure perspective chrétienne.
Notons enfin que "la foi et l'espérance" ne sont pas des vertus morales à proprement parler : ce sont des impératifs posés par la religion chrétienne pour pouvoir exister.

Écrit par : Yogi | 16/08/2009

@ Yogi

> Oui, je suis occidental. Donc je me réfère tout naturellement – et sans honte – à ce qui constitue mon patrimoine culturel. Je n’allais tout de même pas réaliser une encyclopédie complète des civilisations extra-européennes sur ce blog. Je ne vois pas non plus ce qu’il y a de mal à parler de ce qui me concerne directement. Avant de s’en aller au bout du monde, il est plus raisonnable d’apprendre à mieux connaître son propre environnement.
Le « péché » est selon moi un concept bien plus universel, que celui – insipide – du « mal ». De même que la « création » nous mène plus loin que la « nature » pour comprendre le fond des choses. La perspective est chrétienne en effet, mais c’est justement pour cela que le terme de « péché » est véritablement universel. Comme vous êtes matérialiste vous me répondez que non ; mais vous vous placez dans une perspective très spécifique, et qui n’engage que vous. Si votre croyance dans l’explication intégralement biologique de la morale était vraie, vous atteindriez l’universalité. Mais est-elle vraie ? c’est la question.
De toute façon, aucun mot de la langue n’est hors culture, et par conséquent neutre. Pour atteindre cette neutralité, il faudrait parvenir à la connaissance parfaite et ultime des choses. En attendant ce jour, nous devons nous contenter d’utiliser des mots non pas forcément universels, mais adaptés à nos échanges. Voilà tout.
Vous me dites que la foi et l’espérance « ne sont pas des vertus morales à proprement parler ». C’est votre choix. Il est vrai que des vertus surnaturelles ne peuvent être intégrées dans une morale qui se voudrait strictement naturelle. Tout au plus la foi pourrait-elle occuper la liste des « aliénations ». Le langage auquel vous avez recours pour les décrire est en tout cas vide de sens pour une oreille chrétienne : l’espérance et la charité ne sont pas pour nous des « impératifs » mais des dons gratuits de Dieu.
D’ailleurs, qu’entendez-vous exactement par morale ? d’après le Robert historique « MORALE n. f., dégagé par ellipse d’une expression comme "philosophie morale", date du XVIIe s. (1637), c’est-à-dire d’une époque où la morale se laïcise et où "mœurs" et "moral", entrent dans l’usage courant. Le mot s’applique à la doctrine ou science déterminant les règles de conduite et, plus concrètement, à l’ensemble des règles de conduite admises inconditionnellement et considérées comme applicables (1685, Pascal). » Votre « morale » est donc temporellement située, et est née de la volonté de justifier rationnellement une autonomisation et une naturalisation des actes humains vertueux. Les chrétiens, même s’ils utilisent par commodité ce concept, n’acceptent pas une telle compréhension des vertus.

Écrit par : Blaise | 17/08/2009

@ Blaise :

> Nulle honte à être occidental et à ne raisonner qu'en référence à cette culture bien sûr, mais alors il faut être extrêmement prudent dans l'emploi des mots "universel" et "être humain" et les remplacer par exemple par "occidental" et "individu de culture gréco-romaine".
Ainsi, la "faute" est sans doute un concept (vraiment) universel, mais le "péché" ne l'est pas, puisque précisément il est chrétien et donc extrêmement localisé et délimité dans le temps et dans l'espace.
Il me semble à ce titre que se référer à une religion particulière est bien "se placer dans une perspective très spécifique, et qui n’engage que vous", bien plus que de faire appel à des observations biologiques ou anthropologiques, qui pour leur part peuvent prétendre à l'universel.
Quant à la "morale", elle régit en effet les règles de comportement et spécialement vis à vis d'autrui ; il est clair que si pour vous les mots n'ont pas le sens qu'ils ont dans le dictionnaire, le dialogue ne va pas être facile.
Ainsi "la foi et l'espérance" ne sont pas des règles de comportement en société (alors que la charité l'est), même si elles fondent ces règles pour les chrétiens. Plus précisément ce sont des fondements sans lesquels la religion chrétienne ne pourrait exister, ils sont des composants sine qua non du système, c'était le sens de mon "impératifs".

Écrit par : Yogi | 18/08/2009

TARANTINO

> Et dire que Tarantino explique son film d'ignorant ("Inglorious Basterds") par le fait qu'il aurait lu le journal de Goebbels ! Que serait-ce s'il ne l'avait pas lu !!

Écrit par : Byrnes, | 19/08/2009

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