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Salon Désir d’enfant : "Une foire commerciale parisienne de vente d’enfants"
Une GPA, qu’elle soit réalisée aux États-Unis pour 150 000 à 200 000 dollars, « low cost » en Ukraine à 30 000 euros, ou même faussement « altruiste », c’est toujours de l’argent.
B. © BOISSONNET / BSIP / BSIP via AFP

Salon Désir d’enfant : "Une foire commerciale parisienne de vente d’enfants"

Tribune

Par Olivia Sarton

Publié le

Ces 4 et 5 septembre, se tient à Paris la deuxième édition du Salon Désir d'enfant. Olivia Sarton, membre de « Juristes pour l’enfance », association pour la promotion et la défense des droits de l’enfant, analyse cet événement qui fait la promotion de la gestation pour autrui (GPA), pourtant interdite en France.

La seconde édition de la foire commerciale parisienne de vente d’enfants est imminente. Elle se tiendra les 4 et 5 septembre prochains à l’Espace Champerret à Paris avec la bénédiction des pouvoirs publics. Tout un chacun pourra convenir avec un marchand étranger d’acheter les ovocytes d’une femme choisie sur catalogue, de les faire féconder sur la paillasse d’un laboratoire par le sperme du client ou d’un vendeur lui aussi sélectionné, avant de les implanter dans l’utérus d’une autre femme qui mettra sa santé et même sa vie en danger pour attendre un enfant qu’elle remettra à la naissance aux commanditaires moyennant espèces sonnantes et trébuchantes. Ce que l’on connaît sous le nom de gestation pour autrui (GPA) n’est en réalité qu’une exploitation moderne des femmes et une vente d’enfants.

Violation de la loi

Depuis des mois, les pouvoirs publics sont largement avertis et sollicités pour empêcher cette abomination : ministre de la Justice, préfet de Paris, préfet de police de Paris, mairie de Paris, tous les quatre par courrier adressé par l'association « Juristes pour l’enfance » le 10 juin 2021 et relancé le 9 juillet 2021… Pourtant, aucun d’entre eux n’a daigné répondre aux courriers adressés ni n’a cru bon de mettre en œuvre la moindre action pour empêcher la conclusion de ces contrats de fabrication d’enfants.

Quant à la plainte contre X déposée en octobre dernier dénonçant les violations de la loi française constatées lors de la foire précédente, elle n’a toujours pas reçu de suite. Ainsi, alors que la GPA est proscrite en France, des marchands peuvent librement la commercialiser dans notre pays sans la moindre inquiétude. Qu’on se le dise : il est moins risqué de violer la loi française en se proposant comme intermédiaire de GPA que pour un bistrotier de servir un café sans contrôler un passe sanitaire.

Il y a quelques semaines à peine, des célébrités telles que Nathalie Baye, Lambert Wilson, Matthieu Ricard ou Jacques Dutronc appelaient dans une tribune publiée dans Le Monde à interdire la vente d’animaux de compagnie en plaidant que « ce commerce mène à une objectification de l’animal, mis au monde pour le profit et vendu comme une vulgaire marchandise ».

Enfants sans famille d'accueil

Mais à quel point faudrait-il se battre par ailleurs pour empêcher l'objectification de l’enfant mis au monde pour le profit des acteurs du marché de la GPA - agences jouant le rôle d’intermédiaires, avocats, notaires, banques d’ovocytes, cliniques de procréation assistée, sociétés de transport de gamètes et embryons congelés - et vendu comme une vulgaire marchandise ?

Au même moment, des milliers d’enfants ne trouvent pas de famille d’accueil qui les accompagne et les aide à se développer. Ils sont ballottés de foyer en maison d’enfants, voir laissés dans des familles maltraitantes faute de solution, et grandissent en conséquence de plus en plus abîmés.

« Les enfants en foyer n’intéressent pas les candidats à la GPA : ils n’ont pas été conçus sur mesure pour eux. Ils entreraient difficilement dans les projections égocentriques des commanditaires. »

Mais ils n’intéressent pas les candidats à la GPA : ils n’ont pas été conçus sur mesure pour eux, sans défaut apparent. Ils entreraient difficilement dans les projections égocentriques des commanditaires qui aiment s’afficher sur les réseaux sociaux ou dans les magazines avec les bébés acquis.

Et puis, ils ne rapportent pas d’argent. Aucun business à se faire avec eux. Alors qu’une GPA, qu’elle soit réalisée aux États-Unis pour 150 000 à 200 000 dollars, « low cost » en Ukraine à 30 000 euros, ou même faussement « altruiste », c’est toujours de l’argent. Et pour la fascination de l’argent, les pouvoirs publics abjurent la dignité de la femme et de l’enfant en laissant se tenir cette foire commerciale pour la seconde année consécutive. Honte à eux.

A LIRE AUSSI : Enquête sur les réseaux français de la GPA

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne