"Un jour, à Bagatelle, dans le jardin féerique du comte d'Artois, Louis-Charles, emporté par sa vivacité, va se jeter dans un buisson de rosiers. Hue, son premier valet de chambre, qui raconte l'aventure, court à lui : «Monseigneur, lui dis-je en le retenant, une seule de ces épines peut vous crever les yeux ou vous déchirer le visage. Il se retourne et, me regardant d'un air aussi noble que décidé : “Les chemins épineux, me dit-il, mènent à la gloire !”»
Souvent, on arrête là l'histoire, mais la suite est instructive et montre la qualité de l'éducation donnée au jeune prince. Ayant eu connaissance de la repartie, sa mère, la Reine Marie-Antoinette, le fait venir et lui dit : «Mon fils, vous avez cité une maxime très vraie, mais vous ne l'avez pas appliquée justement. Il n'y aucune gloire à se crever les yeux seulement pour le plaisir de courir et de jouer. S'il eût été question de détruire un animal pernicieux, de tirer une personne du danger, d'exposer enfin sa vie pour en sauver une autre, cela pourrait s'appeler gloire; mais ce que vous avez fait n'est qu'étourderie et imprudence. Attendez d'ailleurs, mon enfant, pour parler de gloire, attendez que vous soyez en état de lire l'histoire de vos aïeux et des héros français qui, tels Du Guesclin, Bayard, Turenne, d'Assas et tant d'autres, ont défendu la France au prix de leur sang.» Rougissant, le futur Louis XVII saisit alors la main de sa mère et la baise en disant : «Eh bien ! moi, chère Maman, je mettrai ma gloire à suivre vos conseils et à vous obéir !» Il restera fidèle à cette résolution, non en paroles, mais en actes et en vérité. Ce sera le ressort constant de sa joie intime et, pour tout dire, de sa sainteté."