Regain de violence contre les coptes en Égypte

Regain de violence contre les coptes en Égypte
Jeanne Le Bras, Le Figaro, 12 août 2016
CE SONT des yeux clairs humides qui perlent sur une peau tannée par le soleil du Sud, un long voile noir et des doigts aux phalanges déformées par l’arthrose que l’on triture pendant que le récit se déroule par bribes. « Ils sont entrés chez moi avec des armes automatiques. Ils étaient environ 45. Ils m’ont attaquée et m’ont sortie dehors. Ils m’ont déshabillée. Ils m’ont traînée dans la rue toute nue. Ils ont aussi pillé et brûlé notre maison. » Sohad, 70 ans, habitante d’al-Karam, ville composée de 70 chrétiens pour 15 000 habitants, a subi la violence de ses voisins quand la rumeur s’est propagée que son fils fréquentait une musulmane. Phénomène rampant depuis plusieurs décennies, portées à leur acmé en 2013, après la destitution du président islamiste Mohammed Morsi, les violences sectaires restent un problème récurrent en Égypte.

Ces dernières semaines, elles ont connu une augmentation inquiétante. « Depuis mi-mai, on a relevé au moins 7 incidents très violents », alerte Mina Thabet, spécialiste des droits des minorités à l’Egyptian Comitee for Human Rights. À Alexandrie, une foule de musulmans a délogé des familles et incendié leurs maisons ; à Sohag, la fille d’un paroissien a été égorgée par un homme se revendiquant de Daech ; à Beni Souef, des foules ont attaqué un père de famille, soupçonné de construire une église clandestinement. Le 30 juin, anniversaire du coup d’État militaire, la tension est arrivée à son paroxysme avec le meurtre d’un prêtre à el-Arish, dans le Nord-Sinaï, accusé par la branche égyptienne de l’État islamique « d’appeler à la guerre contre l’islam. » « Les incidents sont quotidiens mais leur nombre est impossible à chiffrer. Les victimes ne veulent pas parler, elles se sentent humiliées et ont peur des représailles », note Mina Thabet. « Nous, chrétiens, nous sentons persécutés », affirme Brahim, paroissien à l’église d’al-Minya, principale ville chrétienne d’Égypte, composée de 35 % de coptes.

« Tout part de rumeurs, une relation amoureuse, une construction d’église… Les gens n’ont pas la culture de la justice, au lieu de se rendre à la police, ils attaquent. » Sohad et son mari ont été plusieurs fois sommés de se rendre à ce que l’on appelle « des sessions de réconciliation », utilisées comme méthode de résolution des conflits communautaires. « Les anciens du village, les chefs de famille, les dirigeants politiques et religieux se réunissent pour résoudre les conflits plutôt que de se soumettre au système juridique. Prétendument dirigées par des arbitres neutres, les réunions sont souvent supervisées par une représentation majoritairement musulmane », dénonce l’institut de recherches The Tahrir Middle East Institute. Malgré une enveloppe de 5 000 livres égyptiennes offerte pour leur silence, Sohad a préféré rendre son histoire publique. « On ne peut plus rentrer chez nous de toute façon, on a tout perdu, souffle la vieille dame. Je veux qu’on me rende ma dignité et mes droits. » « Il est important d’être à l’écoute des chrétiens pour contenir leur colère », insiste l’évêque Makarios du diocèse d’al-Minya, principal gouvernorat touché par les violences. « L’une des solutions est d’admettre le problème et de mettre les persécuteurs en prison. Nous demandons que la loi soit appliquée en dépit de la religion. »

Mais, du côté des musulmans, on s’agace de ces polémiques « montées en épingle dès qu’il s’agit de disputes entre musulmans et chrétiens ». « Les violences entre musulmans, on n’en parle jamais, elles sont sûrement bien plus élevées. Des fous et des extrémistes, on en a dans toutes les religions », assure Alaa al-Sharif, imam et professeur à l’université al-Azhar. Alors que le Parlement examine en ce moment la possibilité de retirer des pièces d’identité la religion des citoyens égyptiens et une meilleure législation encadrant la construction de nouvelles églises, les experts mettent en garde contre la perte de contrôle des autorités sur les relations chrétiens-musulmans dans un contexte de répression très forte. « La violence d’État nourrit la violence civile », assure Mina Thabet. « L’État égyptien a perdu de son pouvoir, sa marge de manœuvre est limitée et son agilité à contenir les tensions n’est plus la même », estime Georges Fahmi, spécialiste des relations religion-État à l’institut Carnegie. « Depuis Nasser, les chrétiens ont toujours été mis en scène à des fins stratégiques », rappelle-t-il.
AveMaria44
N'oublions pas tous nos frères persécutés, en Chine, en Corée, en Afrique, en Inde.......l'islam n'est pas le seul persécuteur.
dvdenise
🙏 🙏 🙏 N'oublions pas les Coptes dans nos prières.
www.la-croix.com/…/Daech-revendiqu…